mercredi 29 avril 2015

Instant de grace


Je me retrouve très souvent confrontée à une situation que beaucoup d'autres parents de jeunes enfants TED connaissent ou on aussi connu... La "non" compréhension de l'entourage vis-à-vis du handicap de mes enfants.

J'ai souvent entendu "mais tu vas voir, ils vont grandir et lorsqu'ils seront adultes ça ne se verra plus ou bien encore "tous les enfants font ça voyons!"... Et j'avoue qu'à la longue, ça devient usant. Comme si l'autisme allait disparaître avec l'âge... Mes enfants ne changeront pas, malgré les années. Ils sont né autiste, ils mourront autiste. Moi je m'y suis faite, mon ami aussi mais je crois que mon entourage à plus de mal et tente des fois de me rassurer mais ce n'est pas utile même si ça part d'un bon sentiment. Ca fini même par en devenir blessant et surtout à la longue, on a comme l'impression que l'autre refuse le handicap de nos enfants.

Bien sûr que tout les enfants font des colères, crient, pleurent, s'énervent etc. Je le sais bien, j'ai un "modèle neurotypique" à la maison qui est mon futur beau fils, ado collé devant ses écrans 18 heures par jours mais au caractère affirmé de 14 ans oui pas facile d'accepter ses futurs petits fréres et soeurs et qui sont des modèles "neuro-atypique" et pour qui les choses sont encore bien différentes.

Mais je voudrais juste tenter d'expliquer un peu les choses :

- Oui Méliha fait encore quelques colères, comme tous les enfants de son âge. A la grande différence, c'est que pour elle, par exemple vis-à-vis des colères, c'est que tout est rapidement prétexte à la frustration et celle-ci engendre des crises démesurées qu'elle ne peut absolument pas contenir. Mais heureusement cela ne dure pas longtemps et elle se calme par elle même,

Certaines fois, nous sommes amené à utiliser la contention pour stopper ses crises qui du haut de ses 7 ans, sont déjà très costaudes mpulsives au possible. C'est dur, mais heureusement avec l'âge les colères cesse car concernant Logan qui a 12 ans aujourd'hui il est plus grand que moi et quand il ai en colère il tape sur les meubles et pousse un cris stident. Ils commencent juste à comprendre les punitions cependant il faut sans cesse expiquer, bien sûr que je suis adulte et que je n'ai pas à me justifier au près de mes enfants cependant c'est le seul moyen de leur expliquer la faute commise,


Un enfant "qui va bien", on pourra le punir, on pourra le réprimender, il finira

par prendre conscience de son comportement et ne renouvellera pas l'expérience car "pas folle la guêpe". Mais avec nos enfants TED, la vie éducative est beaucoup moins simple... Parce que ce qui fonctionne chez un enfant neurotypique (punitions, fâcheries, explications etc.), n'a aucun impact sur nos enfants TED... Au mieux, on obtiendra des pleurs de sa part mais ça ne l'empêchera pas de recommencer dans la seconde qui suit et ça, toute la journée, toute la semaine, toute l'année... C'est ainsi que la méthode PECS entre en actions et ça dès que possible ainsi avec l'aide d'images et de pictogrammes les enfants appréhendent mieux leur environnement. Aujourd'hui mes enfants n'utilisent plus cette méthode car ils ont acquis le langage.

C'est en ça que c'est épuisant en comparaison avec un autre enfant qui fait des bétises ou des colères, c'est que les enfants TED ont des colères démesurées qui conduisent souvent à l'agression d'autrui ou sur eux-mêmes. Et ça part souvent d'un petit rien pour nous, qui est insurmontable pour eux... Elles commencent dés le lever du lit et s'amplifient au fur et à mesure de la journée, dans divers endroits et bien sûr sont démultipliées dans les lieux publics (donc on ose plus sortir pour éviter d'y être confronté).

Donc ne me dites plus "Hooo tous les enfants font des bétises/colères" car il faut vivre avec un enfant TED au quotidien pour comprendre l'épuisement que ses comportements entraînent.

> Un enfant neurotypique comprends rapidement les conséquences de ses actes, pas un enfant TSA/TED car un enfant TSA a déjà beaucoup de mal à comprendre et décrypter les émotions des autres... Comprendre que l'autre est en colère et ce que cela signifie est donc très difficile pour lui.

> Un enfant neurotypique acquiert rapidement les gestes d'autonomie et acquiert souvent la propreté de jour vers 2 ans... Lorsque notre enfant TED a 3 ans porte toujours des couches de jour comme de nuit, c'est assez difficile à supporter (car les couches ont en a ras le bol et le regard des autres est difficile). Notre enfant TED a 5 ans peut avoir encore des difficultés à s'habiller, se déshabiller, manger avec ses couverts, boire au verre...

> Un enfant TED a souvent des troubles du sommeil. Les parents sont souvent amenés à administrer de la mélatonine à leur enfant autiste pour que celui-ci retrouve des nuits sereines. Combien d'enfants neurotypiques reçoivent chaque soir ce type de traitement pour dormir ne serait-ce que 7h d'affilée???Certes ça les aide cependant je refuse de droguer mes enfants car je ne connais pas les conséquences. Quand j'étais enfant je ne dormais pas ou peu à cause de mes installations et ma mère à toujours refusé tout médicament pour dormir.

- Un enfant TED, à la différence d'un enfant neurotypique, n'a aucune conscience du danger. Il pourra partir en courant sur la route, se mettre face à une voiture qui roule en flappant (j'ai eu le cas dans le parking d'un impermarché avec Logan quand il avait 3 ans, il a également pris l'initative d'aller se promener seul quand il avait 9 ans, j'ai eu mon coeur qui a fait un bond, se perdre en colonie de vacances , pourra plonger soudainement dans le grand bassin de la piscine alors que vous êtes dans le basin ludique et que vous lui expliquez que "là c'est le grand bassin faut pas y aller car c'est dangereux quand on sait pas nager!"... Et j'en passe bien sûr que certains enfants pourrais mais parents d'enfants TED, on a tous été confronté à ce genre de mésaventures.

Tu sais y a des enfants qui ont parlé tard tu sais! Et qui sont devenu brillant"

Pour arriver l'age de 4 ans de prise en charge infirmière PECS qui lui apprendra qu'un yaourt peux être décliné sous plusieurs marques.. . Que de travail, de RDV de semaines en semaines, pour avancer à tout petit pas... Sur la voie de la communication et du langage alors que normalement c'est inné pour l'être humain.

> C'est des efforts quotidiens, de la part des enfants, de ma part pour les conduire à tous leurs RDV.

Ne pensez pas que l'autisme part en grandissant... Ne pensez pas que mes enfants rattraperont leur retard "comme ça" non ils n'auront pas leur Bac même avec quelques années de retard, cependant je ferais tout mon possible pour qu'ils obtiennent un diplôme de niveau V , ne pensez pas que sous prétexte qu'ils ont acquis le laquage,qu'ils seront capables de communiquer et échanger comme tout à chacun.

Combien d'autistes vivent à l'âge adulte, encore chez leurs parents car ils n'ont pas acquis assez d'autonomie et d'indépendance (se faire à manger, faire leurs courses, payer les factures etc.)? Certains parlent 10 langues, ont des doctorats mais ils seront malgré tout toujours à la charge de leurs parents. Bien sûr, en tant que parents, on leurs souhaite le meilleur. Je souhaite qu'ils puissent avoir leur propre logement, une famille, des enfants, un travail... Mais le rêve n'est pas prêt d'être réalisable, je reste optimiste le regard de l'autisme changera cependant je me prépare à accepter cette éventualité.

Combien de parents dans mon entourage se sont posés ce type de question vis-à-vis du futur de leur enfant alors que celui-ci n'avait que 10 ans? Peu ou pas du tout.



Parce que ce type d'interrogations, qui ne nous quitterons plus jamais mon ami et moi-même, elles nous ont été amenées avec le diagnostic d'autisme. C'est pas une grippe l'autisme, ça ne se guérit pas et son impact est sur toute la vie de l'individu qui en souffre mais influe aussi sur celui de ses parents et de sa fratrie.

L'avenir d'un enfant autiste, même de haut niveau, reste incertain. A l'âge adulte pour les aider à s'intégrer au mieux au sein de notre société, un accompagnement par un référent est essentiel pour leur vie. Celui ci peut les guider vers l'autonomie par des apprentissages et avoir un rôle de superviseur. Il n'est pas rare de rencontrer des adultes Asperger travaillant en ESAT ou en atelier protégé, on pourrait considérer cette alternative comme un tremplin vers le milieu ordinaire pour la plupart d'autre eux.

Un enfant TED qui fait une crise dans la rue en se roulant par terre, en hurlant et en mordant sa mère, ça fait penser que l'enfant est mal éduqué. Etant maman je n'ai pas vécu cela, mes enfants n'ont jamais eu ce genre de comportements cependant j'ai conscience de cette existence.

Un enfant TED qui saute partout, s'autostimule en flappant, tournant sur lui-même, ça fait penser à un enfant "TDAH" tout simplement... Sauf que lorsque cet enfant grandit, qu'il devient adulte et qu'à 20 ans, on le voit encore sauter sur place, marcher sur la pointe des pieds, s'auto-stimuler en flappant etc. C'est déjà bien différent et, j'ai envie de dire, ENFIN les réflexions cessent. Il est sûr qu'à 20 ans, une personne ayant ce comportement, on ne dira plus aux parents "tous les enfants font ça!".

Tous les enfants acquièrent la marche en commençant par la marche sur la pointe des pieds, mais ça disparaît très vite. Sauf que chez les enfants TED, ça s'installe et ensuite ça peut entrainer de graves conséquences sur leurs tendons (pouvant conduire à l'opération des deux pieds) pour certains.

Tous les enfants acquièrent le langage en passant par un petit stade écholalique qu'on remarque à peine... Sauf que chez des enfants TED les écholalies deviennent envahissantes, elles sont là, tout le temps, de tonalités différentes, d'intensité différentes mais belles et bien présentes et surtout: envahissantes.

Tous les enfants sont sensibles aux stimulis sensoriels car ça fait partie du développement. Sauf que chez des enfants TED cela est démultiplié par 10 ou par 100 voir 1000 selon les enfants TED et que de ce fait, ça entraîne des stéréotypies qui envahissent complètement nos enfants et de ce fait, les coupent petit à petit de notre monde. Ses stéréotypies deviennent tellement envahissantes qu'elles empêchent l'accès aux apprentissages...

De plus, non, notre vie de parents d'enfants TED est désormais bien différente de la vie de parents d'enfants "ne présentant aucun soucis". Car notre vie est conditionnée complètement par le handicap de nos enfants. Celui-ci a une grosse répercussion sur notre vie de famille, de couple, nos finances, notre travail, ... Donc qu'on ne me dise plus "c'est pareil pour tous les parents" Aujourd'hui j'aimerai un autre enfant cependant ma pathologie (arthrose, ostéoporose, perte d'autonomie) et cette peur de revivre cette annonce me terrifie car cela signifierai que le problème génétique proviendrai de ...et même si on ne culpabilise plus la mère comme dans les années 70 certain médecin sont encore dans ce genre de réflexions. Ça sent le vécu hein.

Etre face au handicap, ça m'a changé du tout au tout. Je sais désormais qu'ils m'offrent ce paysage que les membres de ma famille proche ne connaissent pas car ils ne le vivent pas au quotidien. J'aurai préféré l'Italie à la Hollande, cependant, ce voyage m'apportent bien de nouvelles saveurs que jamais le passager du siège d'à coté ne connaîtra...

Accepter ce fait a été très très dur et je ne suis pas sur d'y être arrivée encore (pourquoi? pourquoi moi? pourquoi eux?, pourquoi le bonheur ne frappe t’il pas enfin à ma porte?, c'est pas juste)

Et finalement, c'est mes enfants qui m’ont apporté le plus dans ma vie, me dépasser, croire encore et encore, refuser d'accepter l'impossible, se battre encore et encore, toujours plus loin, lâcher un peu...puis repartir de plus belle.

Mes plus beau défis, je leu dois

Ma force, mes espoirs, mon self contrôle, la patience, je leur dois

Et je sais qu'un jour je pourrai arriver a dire "merci" a l'autisme, merci a ces enfants d'être dans ma vie, merci de m'avoir choisi, merci de m'avoir fait confiance...et merci d'être si spéciales.

La réflexion qui se construit doucement dans mon esprit et dans mon âme est que le handicap n'est pas un "problème" négatif, ni même un fait neutre...c'est une chance, un privilège qui nous permet de développer en nous des trésors de qualités au travers les nombreux apprentissages qu'elle requiert.

Et si le but de cette vie c'était cela, pour chacun, handicapé ou non: développer nos qualités ? Alors le handicap serait presqu'une chance, en ce qu'il exige un développement plus grand de nos qualités et de la morosité de certaines personnes.

Qu'en pensez-vous?

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